Victor Hugo, en 1837, écrivait dans une lettre “Depuis la catastrophe du bas village, tout le Bourg d’Ault s’est réfugié sur la falaise. De loin tous ces pauvres toits pressés les uns sur les autres font l’effet d’un groupe d’oiseaux mal abrité qui se pelotonne contre le vent. Le Bourg d’Ault se défend comme il peut, la falaise s’en va souvent par morceaux. Une partie du village pend déjà aux fêlures du rocher.” Cité par J.Monborgne in Histoire du Bourg d'Ault.
Les falaises de craie d'Ault et Onival sont l'aboutissement à la mer du plateau picard. Au nord d'Ault, les falaises s'éloignent du rivage et leur profil s'adoucit progressivement: on passe de la falaise vive à la falaise morte.
Les zones d'érosion les plus fortes se situent dans les valleuses, c'est à dire des vallons secs perchés au -dessus du littoral: Bois de Cise et Ault.
Le platier, au pied de la falaise est le résultat de ce recul: il est composé en partie par un cordon mobile de galets de silex, issu de cette érosion: il se déplace latéralement, sous l'action des courants de dérive littorale.
L’érosion de la falaise est un phénomène normal, mais elle atteint, entre Ault et Onival, des proportions spectaculaires. Les raisons principales en sont les suivantes:
1. La nature friable des derniers promontoires de la falaise vive, annonciateurs de la falaise morte.
On peut donc estimer que le recul de la falaise au XIXet XXème siècle entre Ault et Onival a été d'environ 30 centimètres par an.
2. L’affaiblissement du cordon littoral protecteur, qui s’accélère au XXème siècle.
C'est l'autre cause aggravante qui explique l’ampleur du recul de la falaise d’Ault dans la période contemporaine : l’amaigrissement progressif du cordon littoral de galets qui ne joue plus, ou très peu, son rôle protecteur, capable de briser l’assaut des vagues et d’empêcher à la base un inéluctable travail de sape.
Comment expliquer cet affaiblissement du cordon de galets? Une émigration des galets d’Ault-Onival vers le nord-est, c’est-à-dire vers Cayeux, a toujours existé sous l’influence des courants et des vents dominants. Mais ce phénomène trouvait autrefois sa compensation dans un constant apport de nouveaux matériaux d’érosion, en provenance des falaises du Pays de Caux ( situé au Sud). Or, à la fin du XIXème siècle, aux éléments naturels s’est substituée l’action de l’homme: ramassage intensif des galets sur la côte normande pour la construction de routes, de barrages, de logements, de bâtiments; la construction d’ouvrages maritimes, parmi lesquels les digues portuaires sont des pièges à galets qui bloquent le mouvement naturel des débris d’érosion.
Au XXème siècle, le recul de la falaise a pu être localement d'environ 70 mètres.
La dangerosité des falaises est telle aujourd'hui, qu'il faut non seulement continuer à renforcer la protection, mais aussi développer la prévention contre les risques d’éboulements.
Le cas de Ault
Il est le plus spectaculaire: ce bourg se situe dans une valleuse. De part et d'autre, le plateau, limité par des falaises de près de 70m de hauteur est en partie occupé par des villas.
Depuis des siècles, ce village a lutté contre les assauts incessants de la mer. En 1570, toute la partie basse disparaît dans les flots suite à une violente tempête. Dès le XVIIIème siècle, des épis (ouvrages de défenses transversaux) sont implantés pour ralentir la dérive littorale et retenir les galets. Et continueront jusqu'à aujourd'hui.