Peut-on
parler d’individuation de l’islam ?
La religiosité
(le sens que les gens donnent à la religion)
change très rapidement et ce changement est commun
à toutes les religions.
Pour Danièle Hervieu-Léger, il ne s’agit
plus de se savoir engendré, mais de se vouloir
engendré. Les gens sortent d’une religion
vécue comme une communauté pour entrer
dans une religion vécue comme une affaire privée.
La pratique
religieuse est en chute libre parmi les jeunes qui ont
maintenant d’autres sollicitations que d’aller
à la mosquée (Internet….) Il y a
d’autres sources d’informations, ce qui
provoque une pluralisation des pratiques et des divisions
au sein des familles. On assiste au passage d’un
islam ritualisé à un islam « libre
service » : on entre dans la modernité.
En Arabie Saoudite, 30% des étudiants à
l’université sont des femmes : elles se
marient donc plus tard, ne veulent plus de la polygamie,
demandent un contrat de mariage, un travail…
Qui sont les acteurs de la modernisation ?
- Des ingénieurs
prédicateurs sur les chaînes de télévision,
sont à la fois psychologues, conseillers spirituels
et conseillers en management ! Un d’entre eux
prêche dans les salons islamiques le besoin de
se repentir et de naître à soi dans et
par l’islam. On serait proche du fondamentalisme,
de l’évangélisme, une adéquation
entre le capitalisme et la refondation du religieux.
- Des écrivains qui proposent de sortir de la
considération du malheur arabe, son marasme économique,
ses déchirures qui l’appauvrissent, et
soulignent la volonté que le monde musulman avait
connue de se montrer et d’être vu entre
1850 et 1960.
Quelles
sont les résistances ?
- Pas plus
de résistance que dans d’autres religions
! L’histoire nous le rapporte…
- Quand, dans le changement, il y a la main de l’étranger,
il y a toujours plus de résistance (cf. le Maghreb).
L’école coloniale a formé les futurs
cadres de la décolonisation (cf. Tunisie) qui
ont retourné contre l’Europe les armes
qu’elle a fournies. L’intensité du
barrage défensif en Afrique du Nord s’explique
par la proximité géographique trop grande
avec l’Europe.
- Il faut cesser de cultiver la nostalgie du passé
et l’espérance d’un futur meilleur,
mais il faut s’occuper du présent pour
éviter la stagnation, la montée de la
morbidité et la condamnation en martyre disent
certains penseurs arabes.
- Il n’y a pas de modernité ni de démocratie
sans laïcité. On commence à penser
la politique en autonomie par rapport au religieux,
mais les populations musulmanes n’ont pas encore
les moyens éducatifs, économiques et sociaux
de se pencher sur la modernité. Les élites
le font de l’étranger.
- Toute l’édition arabe est moins importante
que celle de la Grèce !
Si la modernité
se reconnaît à des indices : laïcisation
de l’éducation, mariages non pré-pubertaires,
taille des familles, la modernisation, quant à
elle, est un processus et demande du temps.